Sur l'ïle...

Une fois engagé sur le pont, la nature de la "pièce" immense devenait visible : il s'agissait en réalité d'un énorme gouffre, large d'une centaine de mètres et assez long pour disparaître dans l'obscurité à leur gauche et à leur droite. Marchants d'un pas rapide sur le pont, ils croisèrent deux gardes squelettes aux casques dorés et aux longues capes violettes, qui suivirent un moment Shandril du regard mais n'émirent pas un mot.

Rapidement, ils parvinrent sur le plus imposant des rochers qui flottaient là, énorme masse d'une cinquantaine de mètres de diamètre d'où partaient de nombreux autres ponts vers les îlots plus petits. Là se tenait un manoir étranges et composite, certainement classique à la base mais sur lequel avaient été rajoutés tant de pièces annexes, d'ailes secondaires, de tourelles et autres constructions possédant chacune son style que l'ensemble paraissait baroque et farfelu... on avait manifestement cherché à utiliser, à l'exception de la petite cour où ils se tenaient, le moindre mètre carré du terrain réduit. Une bonne partie des constructions, d'ailleurs, débordaient sans vergogne sur le vide... et c'est d'une porte ouverte sur vide, soudain, que sorti un mort qui s'avança vers eux.

Avançant sur une passerelle de bois riveté de bronze, dont les toiles d'araignées et les tache de moisissures attestaient l'âge, il arriva sur eux avec une lenteur toute calculée et s'inclina légèrement devant Shandril. Portant une cape d'un bleu profond décoré d'un oeil argenté, à mi-chemin du zombie et du squelette, son crâne grisâtre aux cheveux rares et filandreux portait un diadème d'argent reprenant le symbole de sa cape. D'une voix sifflante mais aimable, il fit :

"Bienvenue à vous, madame. Bienvenue au Magistère."

Ne sachant que dire Shandril dit tout simplement "Merci à vous." en inclinant le buste légèrement.

"Madame, d'autres occupations m'attendent, aussi mon petit interrogatoire sera-t'il bref : tout d'abord, êtes vous particulièrement portée sur un domaine précis de la magie, ou embrassez-vous pleinement l'immensité des arcanes ? Et êtes-vous soumise à des interdits - physiques ou religieux - notables ? Enfin, possédez-vous des talents non magiques affiliés aux arcanes, tels l'enchantement et l'alchimie ? Je compte vous placer au plus vite auprès d'un maître qui vous conseillera et vous assistera, tout en vous préparant à devenir un membre à part entière des nôtres. Et au passage, nous ne tiendrons pas compte de votre quelconque statut vivant : noble, roturier, esclave, vous entrerez ici apprenti comme tout le monde."

Il croisa les mains.

"Alors ?"

"J'essaye de pratiquer l'ensemble de la magie mais je ne connais pas tout hélas, je ne suis pas soumise à quoi que ce soit de religieux ou de physique et je connait l'alchimie mais pas d'enchantement."

"Bien, très bien madame : votre maîtrise d'un art non-magique est déjà un très bon atout en sois."

Il ne fit pas de pause, mais une fugitive lueur dans ses orbites suggéra qu'il venait de considérer de nombreux facteurs avant de reprendre ; comme si il aimait archiver chaque fragment d'une conversation pour une future analyse :

"Je peux vous confier au maître Sylla, qui vous aidera à exercer votre art dans l'Aeternam, ou au maître Ladon qui pourrait vous initier à l'enchantement - si vous pensez pouvoir vous adapter seule aux plantes et ingrédients locaux."

Sa tête décharnée pivota vers l'horizon d'obscurité du gouffre.

"A moins bien sûr que vous ne désiriez étudier seule dans notre manoir. C'est une possibilité que je déconseille, mais elle est intéressante."

"J'était maître de magie dans mon monde, mais je craint d'avoir oublier trop de sorts. J'aimerais vous poser une question, puis-je prendre deux maitres à la fois? Si la réponse est non alors je choisirai le maître sylla" dit Shandril.

"Deux maîtres ? Héhéhé, voilà un nouvel élève interessant... je désigne Sylla comme votre maître officiel, mais vous pourrez suivre les cours de maître Ladon quand vous le désirerez - pourvu qu'il soit libre, bien sûr."

Il fouilla ses poches, en sortit plusieurs blasons et en choisi un qu'il tendit à Shandril : un fragment de tissu ovale aux bords de fils de bronze, orné f'un oeil bleu en fond et de deux serpents se mordant l'un l'autre par-dessus.

"Et puisque vous avez su faire preuve d'initiative, vous serez d'entrée de jeu un blason bronzé, ce qui vous donne accès à la bibliothèque. Y'a-t'il quelque chose dans toutes décisions qui vous dérange ?"

Même si elle ne savait pas ce que signifiait le rang du blason bronzé Shandril dit avec le sourire d'une gamine à qui on vient d'offrir un cadeau "Merci beaucoup, cela ne me dérange absolument pas." Puis elle reprit son sérieux et demanda "Excusez moi mais où se trouve le maitre Sylla s'il vous plaît?"

Il eu un sourire.

"Vous êtes bel et bien motivée, à ce que je vois... fort bien. Leyx, conduis-la, tu sera gentil. Mes salutations, bienvenues et encouragements, madame."

Il s'inclina puis se détourna. Leyx, qui arborait une expression partagée, resta sur place.

La magicienne remercia le mort qui s'éloignait et attendit que Leyx la conduise auprès de maitre Sylla.

Après une poignée de secondes de silence, Leyx se décida à bouget et fit signe de le suivre. Il entra dans le manoir par la grande porte, s'engageant dans un haut couloir au sol tapissé de velour violet et garni de plusieurs portes pour la plupart entrebaîllées. Il suffit d'une poignée de secondes pour arriver au bout, où un petit escalier à l'impériale permettait de monter par la gauche ou la droite vers l'étage supérieur. Entre les deux branches de l'escalier, une porte de cèdre gardée par un squelette arborant le même uniforme que les gardes de l'îlot, caque doré et cape violette. Leyx s'arrêta juste devant lui et fit d'une voix froide :

"La bibliothèque. Montrez-lui votre blason et vous pourrez y entrer quand vous le désirerez."

Il reprit son chemin sans attendre, puis parvenu à l'étage supérieur, qui faisait balcon autour du couloir, dit :

"Les portes d'en bas sont les chambres communes des étudiants et les loges des mages de faible puissance. A cet étage sont les pièces privées des grands mages et des professeurs, leurs noms sont inscrits sur leurs portes. Si vous n'avez pas de question, je vous laisse trouver votre tuteur."

La magicienne fit signe que non et avança dans le couloir pour trouver le nom du professeur. Une fois qu'elle trouva la porte qui l'intéressait elle frappa à celle-ci et attendit patiemment.

Elle ne mit que quelques instants à trouver la porte parmi celles qui lui faisait face, et cogna doucement dessus. Quelques instants s'écoulèrent dans un silence relatif, puis une voix aïgue lui parvint, tout à fait maîtrisée mais montrant de toute évidence des signes d'énervement :

"Aaaaar ! Quoi encore ? J'ai donné les potions sélénites au maître d'hotel, et je suis à cours de Pâlelarme et d'herbe lunaire... livrez-moi ou laissez-moi !"

Shandril fût surprise de la réponse mais elle dit : "Vous vous méprenne maître je ne suis pas ici pour vous livrer quoi que ce soit, je suis une nouvelle arrivante et j’aimerais qu’on m’enseigne la magie. On m’as désigné pour que je sois votre apprenti."

Suivit un silence. Puis :

"Un apprenti ? Un nouvel arrivant ? Bon, je suppose qu'il faut être solidaire et tout le blabla... une seconde."

Des bruits de frottements, d'objets oscillants dangereusement et de parchemin froissés se firent entendre, puis la porte s'entrouvrit légèrement ; laissant seulement voir les serres noires et luisantes qui venaient de la repousser, et une sorte de bec noir qui fit :

"Vous pouvez entrer, mais... hum... au fait, un peu de désordre ne vous dérange pas trop ?"

Shandril fût révulsé quand elle vit le maître Sylla mais elle se reprit vite et répondit : "Cela dépent de ce que vous appelé du bazar. En général non je ne suis pas dérangé par le bazar car dans ma chambre je ne retrouver rien de ce que je cherchais quand j'était encore en vie."

La porte s'ouvrit un peu plus grand, et le bruit des pas suggéra que maître Scylla, si c'était bien lui, retournait vers l'intérieur en dégageant rapidement un passage praticable. L'invitation semblait claire.

Une fois au seuil de la porte, le spectacle eu pour Shandril quelque chose d'amusant : qu'il l'ait cherché ou pas, son interlocuteur restait invisible... des piles incroyables de bouteilles vides, suggérant un equilibre vaguement stable à ne surtout pas déranger, alternaient avec des monticules de parchemins couverts de notes gribouillées et rongées par les vers. Certaines bouteilles et fioles semblaient contenir des objets étrangers, tels des insectes piégés ou le fond de potions désséchées, tandis que certaines piles de parchemin s'était effondrées dans un sens ou dans l'autre lorsqu'il avait fallu y retrouver quelque chose. L'effet d'ensemble était, donc, singulier.

Un passage étroit demeurait, tortueux, au milieu de ces monticules désordonnés... la mage entendit depuis l'autre côté venir cette même voix aigüe aux accents cultivés et à présent calmée :

"Bien, j'aimerais que vous me donniez une estimation de votre niveau en art et puissance magique, ainsi qu'en alchimie... vous classeriez-vous dans les bons, mauvais, moyens mages ? Un peu en-dessous ou au-dessus de la moyenne ? Faites attention aux rouleaux sur le sol, je crois les avoir enlevé mais ces petits fous roulent partout..."

Shandril fût amusé de voir que le maître Sylla n'avait pas menti au sujet du désordre régnant en maître dans sa salle. Elle répondit tout en s'avançant ver le maître : "Eh bien,dans mon monde j'était une maîtresse dans l'art mais je ne sais pas ce que mes connaissances valent ici. Je peux me débrouillez en alchimie mais je ne suis pas aussi bonnes en alchimie qu'en magie. Sinon en tenant compte de mon niveaux dans mon monde, je me classerais au-dessus de la moyenne mais sans prétention."

La voix lui répondit immédiatement :

"Bien. En fait, peu me chaud que vous soyez bonne ou pas, l'important pour moi est que vous ayez une idée de vos forces... et de fait, vos propos semblent assez raisonnables pour être exacts. Nous verrons bien."

Suivi le claquement sourd d'un objet métallique posé sur une surface en bois, puis le froissement d'une flamme vive s'allumant d'un coup.

"En traversant... pourriez-vous m'apporter le bocal contenant le bézoard vert ? Le frais, pas le pots avec les vieux..."

[Je suis censé savoir ce qu'est un bézoard (Harry Potter )? Et si oui.]

Shandril chercha minutieusement le bézoard vert et quand elle le trouvera, elle l'apportera au maître Sylla.

Shandril ne connaissant pas les bézoards dit au maître Sylla : "Je ne vois pas vraiment à quoi ressemble un bézoard. Se peut-il que ce soit ça?" Elle dit ces derniers mots en allant chercher les petites pierres brillantes d'un gris verdâtre.

Elle entendit comme un cri qui la surpris un instant, une exclamation étouffée et suraigüe dont elle n'aurait su traduire l'émotion. Puis la voix de maître Sylla reprit, un peu plus hésistante :

"Excusez-moi, je sais que la plupart des morts ne partagent pas mon... hum... cri d'indice... mais bien, vous savez au moins où sont vos limites."

La lueur au travers des bocaux augmenta, la torche ou la bougie projetant des ombres indistinctes et mouvantes.

"Au bruit, je dirais que vous avez saisi le pot de béozards oxydés... pour prélever un béozard frais, il vous faut l'extraire d'un crapaud intact... trouvez-moi le bon pot et rejoignez-moi, maintenant. Savez-vous quelque chose des propriétés des béozards ?"

Shandril prit alors le pot contenant vu un peu plus tôt et l'amena au maître Sylla.